Moi

Je suis très timide et très sensible. J’ai de la peine à vivre, souvent, pratiquement chaque jour. En ce sens, mon apparence ainsi que les modes d’expression de mon alter-ego sur le web sont très trompeurs. Je donnerais presque l’impression d’être caractériel, orgeuilleux, pompeux, incisif et toujours légèrement menaçant. Vous avez tout faux.
L’autre jour j’ai montré à un vieil ami cette photo qui me sert de passeport ici. Il m’a dit qu’à chaque fois qu’il la voyait il éclatait de rire. C’est pour vous dire…
Quand je bois je deviens certes différent. Plus osé, plus direct et parfois, agressif ou, tout au moins, provocateur. Rien qui ne soit inconnu aux effets usuels de l’alcool… Sauf que dans la vie « réelle » personne ne me connait comme ça : quand je bois, il s’agit d’une fuite virtuelle, je suis un web-coolique. N’allez pas imaginer que je sois alcoolo non plus, c’est aussi une fausse piste.
Je crois que mon blog, si on se met à le lire d’un mois à l’autre en diagonale, est *un peu plus* représentatif de mon personnage. Et encore, j’ai des doutes, puisque essentiellement il s’agit de tentatives d’expressions littéraires où parfois surnagent des parcelles de mon identité.
Cette image de « parcelles de mon identité » vient à me faire penser que je suis quelqu’un d’explosé. Attention, pas explosif, explosé. Cette subtile nuance fait sans doute un joli résumé de moi, puisque je bascule aisément d’un qualificatif à l’autre sans que cela ne se remarque trop.
Que signifie « être explosé » ? Cela veut dire l’opposé d’unité. Je ne me sens pas un mais myriades, il y a par exemple des jours où je peux écrire sur l’amour et d’autres jours où je noie avec plaisir la Terre sous des langues de lave.
Tout un chacun possède sans doute cette variété en soi, tout en préservant une certaine unité de caractère, ce que je ne préserve pas. Le problème étant que j’existe uniquement par l’écriture. Je pense par l’écriture, je suis par l’écriture, je n’ai pas d’identité autre que ce que j’écris. Autrement dit en-dehors du web je suis quelqu’un qui parle très peu, qui ne donne jamais une opinion claire ou engagée, quelqu’un dont les émotions ne se manifestent que par la négation de la vie ou, lorsque c’est positif (rarement à cause de cette dualité qui fait qu’en moi l’un regarde l’autre en permanence et vice-versa), par de répétitifs et peu signifiants « c’est beau, c’est beau ».
Pour tortiller un peu plus cette confusion, toute identité sur le web existe avant tout elle aussi par les mots. Cette pluralité possible par les mots, gangrène de l’union du moi, fait que je déverse ou retiens toutes sortes d’opinion d’un « moi du web » qui en fait n’existe pas autrement que par ce déversement, ou ce silence, de mots. Cet état vient encore nourrir l’ambiguité originelle.
Je suis ce que j’écris, or dans l’écriture, je peux être le personnage que mon imaginaire souhaite.
Attention, je ne parle pas d’un acte conscient, d’une volonté d’être multiple, mais bien de la manifestation spontanée d’une identité qui n’a pas son équivalent en-dehors du web, en-dehors de l’expression de soi par les mots.
Ma photo de couverture image bien cet état de non-existence, ici comme dans le vrai monde. Je semble menaçant, mais en même temps je vous regarde d’en-bas, comme si je me redressais ahuri d’un rêve de moi-même où je me serais retrouvé, regroupé. En fait j’ai peur de vous. Et la peur de l’autre engendre justement, la peur de cet autre.
Là , je vous ai décris un mécanisme, une procédure qui, partant d’une identité explosée, aboutit en fin de compte à la création d’un personnage. Moi. Car vous vous êtes construit ou vous vous construirez une idée de moi, une idée unique, une entité concrète et réunie, ne voyant peut-être pas cette ensemble désordonné, ces contradictions, ce chaos qui, bon gré mal gré, car il faut avoir une idée unie de quelqu’un d’inconnu, constituera mon personnage à vos yeux.
Je devine cependant qu’on me prend souvent avec des pincettes. On se méfie, on craint que je ne me retourne en hurlant, que je sois en réalité quelqu’un d’autre que ce personnage, que cette idée qu’on s’est faite de moi. Vous ressentez quelque part le côté explosé, et le faites basculer automatiquement, dans ce processus d’unification de l’autre, à explosif, donc à « manipuler avec précautions ». C’est en effet la conséquence logique de ce que je viens de vous décrire.
Maintenant que vous avez terminé cette lecture, ces mots vont venir s’agglutiner à votre univers et apporter une autre touche à mon personnage, aux côtés des autres. Ce personnage qui, ai-je l’impression, plus j’écris plus s’éloigne de moi.
Vous croyiez être HRP ? Mais non, il n’y a PAS d’HRP. Regardez un peu les fiches autour de vous. C’est VOTRE monde, c’est MON monde, c’est un monde qui n’existe pas.
Et pourtant, il a beaucoup plus de sens que l’autre.

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