Tu dors je me lève. Mais le soleil ne s’est pas levé ce matin. Un voile gris plane sur les toits. Je ne mangeais que de la bouillie d’avoine. Tu m’as donné le miel, le caramel, le manioc. Et maintenant ce que je goûte est fade comme un vieux lait. Tu rêves je marche dans un jour plat. J’étais un robot et maintenant je suis vivant. Tendre fragile translucide, j’avance doucement dans ta nuit et mon jour. Je ne touche plus rien comme avant. Je touche tout comme si c’était ta peau. Tu dors je me lève. Je marche dans le jour comme dans ton rêve. Je suis ton rêve quand tu peuples ma réalité. Maintenant tu respires doucement dans la nuit, j’étouffe lentement dans le jour. Je ne t’appartiens plus. Tu m’as toujours échappé. Je suis un nuage doux et perdu qui aimerait la lumière de l’autre côté de la terre. Tu dors je me lève. Comment le jour peut-il être le jour? J’avance, je vis, je fonctionne, comme le prisonnier à qui on a donné la liberté avant de le remettre au cachot. Je fais semblant d’exister encore. Je fais semblant de respirer encore. Je dois faire semblant. Tu dors je ne me lève pas. J’écarte les voiles de l’espace, du temps, des nuits et des jours, car maintenant je le peux, et dans un geste qu’aucune loi de ce monde n’accepte, je tends le doigt vers ton visage endormi, caresse ta joue, souligne le coin de ta bouche, glisse sur ton épaule. Je suis ton rêve et tu es ma vie. Je disparais dans tes étoiles et levant l’esprit vers mon ciel, je vois les étoiles à côté du soleil, je vois la nuit à côté du jour, je vois l’affreux à côté du beau, je vois tout et rien, et comme c’est beau, et comme c’est douloureux, car maintenant je vois tout et rien. Éveillé, je rêve, ce jour, je m’endors éveillé sous les étoiles.
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